LES CENDRES DU PÈRE
de MARCO CARBOCCI
Un homme ramène les cendres de son père en Toscane, dans ce village perché sur la colline, qui fut autrefois capitale des Étrusques et n’est aujourd’hui qu’un hameau vidé de ses derniers habitants. Peut-être n’est-il plus possible de vivre sur la colline, constatera-t-il. Peut-être d’ailleurs n’est-il plus possible de vivre non plus en Toscane ou dans toute l’Italie. Résolu cependant à y interroger ses racines, il se souviendra des récits que son père lui faisait lorsqu’il était enfant.
Et son père lui dira de nouveau, affectant tantôt de la désinvolture, tantôt de la gravité, son expertise du vieux siècle passé : l’époque fasciste et son arbitraire, l’après-guerre et l’exode rural, l’engagement révolutionnaire et l’émigration. Il lui racontera la précarité d’une vie, d’un monde où tout est à la fois effort et renoncement, répétition et changement. Il lui lèguera enfin l’exigence de conserver intacte la faculté de questionner tous les possibles.
Que reste-t-il de cette expertise ? Non de la nostalgie, mais la conscience que tout se démêle toujours entre le progrès et la tradition, l’identité et le déracinement, l’utopie et le quotidien. Et puis, au terme de ce périple, la conviction que, tant que l’on se souvient, il n’existe pas d’ancien et de nouveau, de vivant et de mort, de moderne et de périmé : il y a ce qui est éternel et ce qui ne fait que passer.