HISTOIRES SINGULIÈRES
DE VIES ORDINAIRES
de Chloé Dubreuil
Voilà un recueil écrit comme un miroir tendu à notre société, une plongée dans ce qui se murmure autour de nous, en nous aussi parfois.
Les histoires qui le composent mettent en scène des personnages tout en heurts et fragilités, bousculés par la vie, par son âpre réalité. De temps à autre, ils nous emmènent dans quelque pays lointain ou univers décalé, comme si, au fond, il n'y avait pas de frontière entre le rêve et le monde qui nous entoure.
Histoires singulières de vies ordinaires, c’est un voyage dans l'âme humaine.
Quatorze nouvelles fortes, étranges, troublantes.
Quatorze nouvelles qui ne s'oublient pas.
Extrait :
- Regarde, dit l’enfant.
Ce qu'il désigne est un tableau, l’écho d’une épiphanie d’atmosphère ; un tableau signé Vincent Van Gogh.
- Dessine-moi des soleils, ajoute l’enfant.
Une ligne d’un blanc émaillé se profile entre ses lèvres. Elle a tout l’air d’un trait qui relierait un point A à un point B (l’idée de joie à celle de bonheur), il ne faut pas la briser.
Que rétorquer ?
Comment le père pourrait-il expliquer à l’enfant que les soleils dont il parle ont tout de sphères étoilées.
Que la nuit a pris le pas sur le jour.
Que l’oppression ressentie par la vague déferlante du ciel a quelque chose de féroce et qu’il pourrait sombrer, être happé, déchiqueté par cette série de chromes et de bleus ?
La main tremble, la craie hésite. Le père devra bientôt rendre l’enfant, l’heure tourne, mais il ne se décide pas. Pourquoi l’a-t-il conduit en ce musée ? Le tableau captive le garçon. Ses yeux se plissent pour mieux contempler la toile et ses volutes nébuleuses. Elles ont quelque chose de magique pour lui. Il a le sentiment d’un astre démultiplié, comme une guerre des mondes qui roulerait ses fanes au-dessus du village tracé à gros traits hachés. Et puis il y a cet arbre, là, au ras de son regard qui semble vouloir monter vers le firmament. L’enfant en est sûr, l’arbre est prêt à s’envoler pour perforer de ses cimes le royaume des dieux.